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Vendre votre entreprise après le coronavirus ? Réponses aux questions les plus fréquemment posées

Reprise d'entreprise
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Valorisation d’une entreprise

Quel est l’impact du Covid-19 sur les ventes des entreprises ? Que nous dicte la sagesse si vous cherchez actuellement un bon parti pour vendre votre PME ?

Les banques sont-elles disposées à accorder des prêts et, si oui, contre quelles garanties ? Et qu’est-ce qu’un prix correct post Corona ?

Bram Verstraeten, partner Dealmakers, partage son point de vue sur un monde des affaires en pleine mutation, mais qui continue néanmoins à être régi par certaines règles d’or.

« Les acheteurs vont-ils tenter de tourner la situation à leur avantage ? Je vous le garantis ! Les vendeurs vont-ils en pâtir ? Assurément ! Et pourtant, il y aura toujours des ventes et des reprises. Plus encore que d’habitude, en ces périodes d’incertitude il nous appartient de rendre le processus de vente aussi objectif que possible. Mieux vous êtes préparé, plus vous avez de chances d’obtenir un bon deal et moins vous aurez de discussions après coup. »

Comment la crise affecte-t-elle les dossiers de reprise actuels et futurs? 

Pour dresser un tableau clair de la situation actuelle, distinguons trois catégories : les dossiers en cours de préparation, les affaires avec lesquelles nous sommes sur le marché et les dossiers qui se situent dans une phase finale. 

Quen est-il des accords en préparation? 

« Ces derniers mois, de nombreux clients (vendeurs) et acheteurs potentiels se sont concentrés sur la sauvegarde de leurs activités commerciales, le bien-être de leurs employés et de leur famille, sur les idées propices à relancer leur activité… Dans neuf cas sur dix, ils ont temporairement enclenché la touche pause du processus de vente. Et pourquoi ne fut-ce pas le cas pour toutes les entreprises ? Parce que certains secteurs ne furent pas (ou guère) impactés. Il suffit de penser à l’e-commerce, les services IT ou les activités liées à une forme quelconque de service d’abonnement comme les assurances ou les sociétés de leasing. 

Dans les semaines à venir, nous continuerons à évaluer nos dossiers de vente au cas par cas. Si nous constatons, par exemple, que les entreprises du vendeur comme de l’acheteur sont à nouveau pleinement opérationnelles à 100 %, nous pourrons reprendre le fil. » 

Quen est-il des transactions sur le marché? 

« Nous avons mis en veilleuse la moitié des dossiers de vente qui se trouvaient déjà sur le marché avant la pandémie, principalement sur demande de l’acheteur qui souhaitait se concentrer sur ses activités principales existantes. Nous concluons l’autre moitié des dossiers par des appels vidéo et, là où les circonstances le permettent, par des réunions physiques. Le processus de décision connaît évidemment un ralentissement, un accord ne peut être définitivement conclu que si les gens s’asseyent ensemble autour d’une table. » 

Quen est-il des dossiers en phase finale, avec une lettre dintention signée et en phase de due diligence? 

« Les dossiers de fusions-acquisitions pour lesquels un accord de prix avait déjà été négocié, une lettre d’intention était signée et le processus de due diligence était entamé ont été finalisés dans de nombreux cas. Étant donné qu’aucune des parties ne voyait de raison pour ne pas conclure. Voyez, entre autres, le cas de Hens bv – Van Mossel Automotive. Parfois, nous avons enregistré quelques semaines de retard, mais quand on sait que de nombreux processus de vente prennent un à deux ans, l’impact demeure finalement assez réduit. » 

Quels sont les secteurs plus impactés ? 

« Les secteurs de l’événementiel, de l’Horeca, du tourisme… ont connu un confinement quasiment complet et la reprise prendra du temps. À l’opposé, les vendeurs de vélos, l’e-commerce, certains fournisseurs informatiques… ont connu une période exceptionnellement intense. Le temps nous dira si certains changements dans le comportement des entreprises et des consommateurs vont perdurer, mais on imagine difficilement un retour à « l’ancien régime ».  

Certaines de ces tendances se traduiront par des économies d’échelle et un besoin d’investissement supplémentaire. Ces secteurs en croissance feront l’objet d’une activité accrue et, en outre, les entreprises y seront plus valorisées si elles constituent la bonne pièce qui vient conclure le puzzle. » 

Existe-t-il un risque de perte de valeur? 

« Nous constatons d’ores et déjà que l’acheteur se sent plus renforcé au niveau de la négociation. Il a tendance à formuler davantage d’exigences et inclut des modalités supplémentaires lors des tractations : earn-out, paiement différé, flexibilité en matière de période de collaboration afin de garantir la continuité, etc. 

Évaluer correctement une entreprise devient aujourd’hui un exercice de plus en plus périlleux. Quelles sont les actions que nous entreprenons pour relever ce défi ? Agir de manière proactive. Dans cette optique, il convient de surveiller très étroitement les clients et de faire les comptes chaque mois. Il faut suivre de près la planification des liquidités, c’est crucial – d’ailleurs, cette recommandation s’applique à toutes les entreprises. Si nous voulons dresser un tableau complet, des chiffres précis et actualisés s’avèrent indispensables en vue d’une évaluation. » 

Le coronavirus exerce-t-il par définition un impact négatif sur lévaluation? 

« Si nous partons du principe que le coronavirus exerce un effet ponctuel sur votre entreprise, alors cette éventuelle période de conjoncture négative ne reflète nullement la santé et le potentiel de l’entreprise.  

Le M&A Monitor de la Vlerick (lire également en page 4) indique que nous sortons d’une période de hausse des évaluations et d’augmentation du nombre de transactions. Il est évident que 2020 va marquer une rupture, mais il est trop tôt pour en préciser les effets à court et moyen terme. Le risque d’une récession à l’échelon mondial est tempéré par les nombreuses mesures prises au niveau national et international. Il appartient à chaque investisseur et à chaque chef d’entreprise d’effectuer les analyses adéquates et les compromis qu’ils jugeront justes au niveau de l’entreprise. » 

Quel est limpact sur les emprunts et les garanties bancaires? 

« C’est une histoire à double sens : la perspective et la réalité des banques et l’offre des investisseurs, de riches particuliers proposant des formes spécialisées de prêts, des crédits-ponts et des instruments hybrides. » 

Les banques voient des opportunités 

« Afin de soutenir les entreprises par le biais d’emprunts, le gouvernement a mis au point un système qui permet aux banques d’accorder des prêts couverts par une garantie de l’État. Ce plan bancaire « bazooka » s’élève à 50 milliards d’euros. Le gouvernement a donné une mission aux banques, mais bien sûr les banques enregistrent elles aussi leurs propres profits et pertes. Si elles dénichent un dossier de reprise bien ficelé dans une entreprise aux risques limités, elles agissent de la même manière qu’avant la crise du coronavirus.  

De nombreuses banques intensifient leurs efforts, car cette crise est également porteuse d’opportunités. Si elles parviennent à sélectionner les bons dossiers et aider des entreprises à court terme, elles parviendront à fidéliser de bons clients sur le long terme. 

En matière de garanties, Il ne faut pas s’attendre non plus à de grands changements. Les banques ont toujours voulu et obtenu des garanties. Et que ce soit via PMV, un prêt win-win, le fonds de garantie, un Vendor Loan (ou crédit vendeur), ou une garantie de l’acheteur, cela ne fait pas beaucoup de différence lorsque nous considérons les demandes de financement. » 

Plus de possibilités dalternatives flexibles 

« Il existe une demande croissante pour une forme de crédit flexible que les banques auront du mal ou ne pourront pas satisfaire parce qu’elles sont tenues de se conformer aux règles de compliance. Par exemple, le nombre d’entreprises nécessitant un crédit temporaire parce qu’un de leurs gros clients ne paie pas est en hausse. En principe, ces entreprises sont saines mais elles se voient souvent opposer un refus lorsqu’elles introduisent une demande pour ce type de prêts auprès de leur banque. Un nombre croissant de particuliers fortunés ont entrevu une lacune dans le marché. Ils émettent dès lors des prêts à un taux d’intérêt confortable et couverts par des garanties solides.  

Il y a beaucoup d’argent disponible et, dans la période post-corona, une hausse des taux d’intérêt est encore mois probable qu’avant. Les financiers en quête de rendements ciblent donc de plus en plus les actions et le marché des PME. 

En outre, la « désintermédiation » s’accélère : de plus en plus d’investisseurs proposent des formes spécialisées de prêts, des crédits-ponts et des instruments hybrides. Ce nouveau type d’accès aux financements permet de compenser la baisse éventuelle du financement bancaire. » 

Est-il préférable dattendre pour vendre une entreprise? 

« Notre conseil aux clients existants qui ont déjà pris la décision de vendre est le suivant : semaine après semaine, nous prenons la température du marché. Et en attendant, nous assurons les préparatifs: préparer un dossier en vue de le présenter à des acheteurs prend 8 à 10 semaines. Reporter la décision n’a donc guère de sens. 

Un processus de vente est comparable à l’assemblage d’un puzzle. Il y a plusieurs pièces : les motifs pour vendre, le prix souhaité, l’interaction avec les initiatives privées, les projets d’avenir lorsque la vente sera conclue, les préoccupations concernant les employés… Tous ces éléments doivent s’emboîter. La dernière pièce de chaque puzzle demeure, corona ou pas corona, cette sensation de: cest LE moment. 

Si l’on est bien préparé et que l’on connaît l’impact du coronavirus sur le business, il est tout à fait possible de mettre une entreprise sur le marché dans des délais assez brefs. Dans les circonstances actuelles, vendre une agence événementielle n’est pas l’idéal. Par contre, un commerce de bois qui a dû fermer ses portes au public, mais qui a pu continuer à fonctionner durant la crise, peut constituer un dossier parfait. 

Tout est une question d’estimer correctement, entreprise par entreprise, secteur par secteur. »